Délia, en mission pour maintenir la paix et protéger les leaders sociaux
Propos recueillis par Claire Jeanpierre, Réseau Mondial de Prière du Pape en France
Délia est une jeune Chilienne. Elle a fait ses études de droit à Santiago du Chili et s’est peu à peu spécialisée dans les droits de l’homme. Elle a été sélectionnée par l’ONG ‘Peace Brigade International’ ou ‘Brigades internationales de la paix’. Son engagement donne chair au défi de ce mois et nous invite à prier pour ceux qui luttent au péril de leur vie pour les droits fondamentaux sous les dictatures, les régimes autoritaires mais aussi dans les démocraties en crise.
Je suis enthousiaste à l’idée de faire grandir la justice et la paix
RMPP- Délia, qu’est-ce qui t’a motivée pour rejoindre les Brigades de la paix en Colombie ?
Très vite j’ai voulu me rendre compte de la réalité du terrain plutôt qu’analyser de façon théorique l’organisation interne des États pour déterminer leur responsabilité. Je voulais comprendre la situation des personnes qu’on « protège » par des décisions de justice internationale qui arrivent souvent trop tard. On dit chez moi : « la justicia que llega tarde, no es justicia (la justice tardive n’est pas justice). »
Je me suis intéressée à la violence socio-politique en Colombie. Elle atteint des chiffres alarmants concernant les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées. J’ai eu alors l’opportunité de rejoindre les Brigades internationales de la paix qui protègent les leaders qui se battent pour le respect des droits fondamentaux. Je commence une mission de 18 mois et viens de rejoindre un groupe de 15 jeunes. Notre mission est colorée par la situation particulière de ce pays qui a connu de graves crises et beaucoup de violences, bien avant celles des FARC et autres groupes armés. Je suis très enthousiaste à l’idée de m’associer à ce travail de protection des leaders afin qu’ils puissent continuer à prendre la parole librement en essayant de faire grandir la justice et la paix dans leur pays.
RMPP- Quels sont les droits bafoués en Colombie ?
De nombreuses organisations internationales signalent des violations des droits à la vie, droits de l’enfant (il y a beaucoup de recrutements forcés), droit à la liberté individuelle, droit à l’intégrité individuelle, droit de propriété privée et collective, droit au respect de la sexualité (beaucoup de viols dans les conflits armés), et le droit d’être protégé juridiquement, car il y a beaucoup d’impunité dans ce pays.
Les politiques internationales de lutte contre les cartels de la drogue n’ont pas arrêté la violence qu’ils provoquent, le trafic n’a jamais cessé. Quatre ans après le traité de paix entre les FARC et le gouvernement, de nouveaux groupes armés occupent le vide laissé.
Les leaders sociaux – indigènes, défenseurs de l’environnement ou des droits humains -, même s’ils sont avocats, journalistes ou chercheurs, sont soumis aux pressions des militaires, des politiques, à celles des guérillas, aux cartels de la drogue. Animés par l’amour et le désir que leurs communautés soient respectées, que la corruption et la violation des droits soient dénoncées, ils sont la cible des groupes armés et souvent condamnés à mort.
RMPP- Peux-tu m’en dire plus sur le fonctionnement de ces Brigades de la paix ?
PBI accompagne des leaders dans les territoires où la présence de groupes armés est connue. Ceux-ci sont conscients de la neutralité de l’ONG qui, de fait, est relativement respectée.
Le but premier de PBI est de protéger l’action des leaders sociaux. Elle agit donc principalement pour la sécurité et la protection des personnes. On rencontre par exemple des communautés indigènes qui, en raison des actions des groupes armés illégaux, sont en confinement forcé et menacées. On constate qu’il n’y a pas de réponse efficace pour les protéger.
Plusieurs piliers caractérisent l’action des Brigades internationales de la paix : la non-violence, l’impartialité, la non-ingérence (les équipes de PBI ne sont pas impliquées dans le travail des organisations et personnes accompagnées), le caractère international (les volontaires agissent en tant que relais de la communauté internationale), l’horizontalité (avec la prise de décision par consensus à tous les niveaux), et enfin la ‘non dénonciation’ qui permet de maintenir une communication étroite avec tous les organismes publics visant à assurer la sécurité en Colombie.
Par un accompagnement physique et psycho-social des leaders et un travail auprès des politiques au niveau national et international, PBI offre un soutien dans la reconstruction du tissu social, soutien très important pour des communautés déchirées par les conflits armés.
Propos recueillis par Claire Jeanpierre, Réseau Mondial de Prière du Pape France
Pour aller plus loin, découvrir la situation en Colombie
et la mission des Brigades Internationales de la Paix.