Grâce à Eau et Vie, l’eau arrive dans les bidonvilles
Claire, et le Réseau Mondial de Prière du Pape
Nous aurions pu donner la parole à de nombreuses associations qui s’engagent dans des projets innovants de développement. Notre attention a été retenue par l’ONG Eau et Vie. Elle est présente dans 25 bidonvilles des Philippines et du Bangladesh pour permettre l’accès à l’eau à des populations en grande précarité et exclues des plans locaux de développement.
Quel a été le facteur déclencheur de la création de cette ONG ?
Après plusieurs mois passés dans les bidonvilles de Manille dans le cadre d’un projet de microcrédit et des expériences professionnelles dans le secteur de l’économie sociale et solidaire en France, les deux fondateurs ont décidé il y a 15 ans de créer Eau et Vie1, pour tenter de répondre à la situation dramatique de ces populations privées de tout accès à l’eau potable. Ainsi chaque jour, Dhaka, la capitale du Bangladesh, accueille 1500 nouveaux arrivants dans des bidonvilles.
C’est parce que l’accès à l’eau est un enjeu crucial au niveau sanitaire, économique et social qu’il est urgent de proposer des solutions durables. Les habitants des bidonvilles ont eux aussi le droit d’accéder durablement à l’eau courante à domicile.
Qu’est-ce qui anime les personnes investies dans ce projet ?
Nous sommes aujourd’hui neuf salariés en France. Nous voulons répondre à l’urgence sociale et à l’injustice de la situation de toutes ces personnes oubliées des projets d’accès à l’eau parce que présentes sur un territoire urbain où personne ne souhaite les voir s’installer. Nous touchons particulièrement les femmes parce qu’elles font les corvées d’eau et sont usées par le poids des charges à porter, et les enfants parce qu’ils sont les premières victimes des maladies hydriques. Nous voulons aussi mettre fin aux pratiques illégales de raccordement, sources de tensions et d’injustice.
Dans les pays concernés, nous avons une centaine de salariés qui font tourner les projets ; ils sont techniciens ou opérateurs de service. Nous avons créé deux entreprises sociales qui emploient 93% des salariés locaux – dont 40% issus des bidonvilles -, leur donnant accès à une formation et à un suivi.
Pouvez-vous nous présenter le projet en quelques mots ?
Nous avons réussi à équiper 25 bidonvilles en eau potable, soit 12000 personnes au Bangladesh et 38000 aux Philippines. Nous nous branchons sur le réseau d’eau de ville existant à proximité, et construisons un réseau d’eau potable auquel nous raccordons les habitations individuellement. Nous avons un système de paiement hebdomadaire, avec des tarifs adaptés, ce qui permet à ces populations précaires de régler leur consommation alors qu’elles ne pourraient le faire avec un système classique de factures mensuelles. Cette solution est un facteur de développement et de sortie de la pauvreté des familles. A côté de cela, nous menons des actions pour un développement durable, basées sur des programmes d’hygiène et de prévention incendie.
Pouvez-vous avoir une action de sensibilisation au niveau international ?
Nous sommes trop petits pour peser seuls sur l’international, mais nous intervenons lors d’événements de portée internationale, comme le sommet ChangeNow ou le Asia Water Forum, afin de partager notre expérience et sensibiliser les acteurs sur le manque d’accès à l’eau.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
Nous avons acquis une vraie expérience et un savoir-faire, ce qui nous donne envie d’élargir notre présence. Nous avons la volonté d’ouvrir une antenne dans un troisième pays et continuons à dupliquer le modèle dans davantage de bidonvilles au Bangladesh et aux Philippines. Les équipes locales sont maintenant structurées et formées, elles ont des liens solides avec les autorités.
Notre objectif est que nous puissions progressivement nous retirer des lieux qui fonctionnent de manière autonome ; cela est déjà arrivé en Côte d’Ivoire (ouvert en 2015 et fermé en 2021), où la gestion du réseau a été transférée à l’opérateur d’eau local quand il s’est senti capable de le faire, à la suite d’un programme de formation de l’opérateur et des habitants. Nous développons pour cela notre présence et soutien auprès d’un comité d’habitants capables de se mobiliser pour leurs besoins et leurs droits dans le domaine des services essentiels. Nous espérons que l’opérateur municipal pourra peu à peu reprendre la charge du service d’eau avec un système de collecte hebdomadaire sur le modèle du micro-crédit.
Malgré les défis et les difficultés, ce rêve est peu à peu devenu réalité et il est appelé à grandir !
Propos recueillis par Claire J. auprès de Cindy de l’ONG Eau et Vie
Retrouvez ICI les programmes et résultats de l’ONG Eau et Vie, ainsi que cette vidéo sur leur action au Bangladesh.
A lire aussi sur notre site le témoignage d’une bénévole du CCFD-Terre solidaire.