Jésus m’invite à cultiver le beau et à habiter l’instant présent
Réseau Mondial de Prière du Pape en France
« Prions pour que les personnes qui souffrent de dépression ou de burn out trouvent un soutien et une lumière qui les ouvrent à la vie. »
Paul est atteint de troubles bipolaires, une maladie apparue sans crier gare il y a trente ans. Alternant périodes de sérénité et rechutes qui envahissent son esprit et son cœur. Habité par moments par un désarroi inexplicable, par une impossibilité de communiquer pour s’en extraire un peu, et par une solitude extrême. Il a beaucoup cheminé et a découvert la force de l’instant présent. Il le cultive aujourd’hui, nourri de pensées de sagesse qui l’aident à prendre du recul et à trouver la sérénité.
Il accepte de commenter quelques phrases données par le Pape à l’occasion de l’angélus du 9 juillet 2017, en l’éclairant de sa propre expérience de la maladie.
« L’erreur, quand les choses vont mal, c’est de rester là où l’on est, allongé. »
Comment percevez-vous cette invitation ?
Quand on dit à quelqu’un de dépressif : « Bouge-toi !», cela ne sert à rien, c’est contreproductif ; cette parole n’est pas pour moi une lumière… Les paroles du Pape qui me parlent sont celles où il évoque un Dieu Amour. Cela me fait cependant penser à Martin Luther King qui disait : « Si tu ne peux pas voler, alors cours. Si tu ne peux pas courir, alors marche. Si tu ne peux pas marcher, alors rampe, mais quoi que tu fasses, tu dois continuer à avancer. » Je me répète souvent ces paroles. Je me lève encore parfois le matin avec des pensées suicidaires et je cultive pour les combattre une foule de pensées qui m’aident à vivre. J’essaie aussi de m’oublier, c’est un combat quand on est enfermé dans sa souffrance.
« Il ne suffit pas de sortir de soi, il faut savoir où aller »
Comment cela résonne dans votre histoire ? Vers qui, vers quoi pouvez-vous vous tourner pour avancer ?
Les autres peuvent nous aider à sortir de nous-même. Mes proches me donnent beaucoup d’amour et j’essaie de leur en donner en retour. Pablo Neruda dit : « Un seul mot, usé, mais qui brille comme une vieille pièce de monnaie : merci ! » Je ne cesse de dire merci pour le cadeau qu’est la vie. J’ai vécu trente ans sans goûter l’instant présent, noyé dans l’activité. Mes pensées traduisent mon appréhension de la réalité ; je les calme maintenant par la force de l’instant présent qui me permet de m’ouvrir à l’amour.
Je collectionne les auteurs et les citations : Christian Bobin, Saint-Exupéry, Etty Hillesum, le Dalaï Lama, Sœur Emmanuelle, Teilhard de Chardin, Montaigne, Boris Cyrulnik, Christophe André et tant d’autres… Elles m’aident à trouver du sens, je m’en nourris, me les répète, et peu à peu elles m’imprègnent et me changent, me permettent de rester debout. Internet est une mine pour moi, cela m’a permis de sortir de ma solitude en cherchant la vérité. Pour combattre la maladie, « je prends soin des minutes et les heures prennent soin d’elles-mêmes ». Encore une citation, de Lord Chesterfield.
« Jésus ne nous enlève pas les poids de la vie, mais l’angoisse du cœur »
Est-ce que cette phrase du Pape vient vous rejoindre ?
Jésus est pour moi un prédicateur de génie. Je suis touché par ses paroles : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimé » ; elles m’invitent à cultiver le bien, le beau. Si je ne crois pas que Jésus soit Fils de Dieu, je parle cependant souvent au Jésus de mon enfance ; je lui adresse des prières, je les ai apprises à mes enfants.
Je cherche à ne plus me laisser distraire par des futilités. Je plains les personnes qui se disent athées car pour moi on a besoin de Dieu comme on a besoin de pain, d’air et d’eau pour vivre. La foi en la transcendance m’aide à vivre et à m’émerveiller. Je peux dire que ma foi m’a sauvé, même si je n’ai plus aucune pratique car je ne me retrouve pas dans les rites et les dogmes de l’Église.
« L’issue se trouve dans la relation, dans le fait de tendre la main et de lever le regard vers celui qui nous aime vraiment. »
Pouvez-vous illustrer cette phrase ?
Cette phrase est pour moi tout à fait juste. Il m’arrive de faire des petites choses dont je ne me serais jamais cru capable, je le fais uniquement par amour. « Il n’est qu’un luxe véritable et c’est celui des relations humaines. » Antoine de Saint-Exupéry
La valeur de la vie est pour moi spirituelle. Je cultive ma vie spirituelle comme le jardinier qui sème et arrose ses plantes. J’en prends soin sans cesse. Je crois à la vertu des petits pas. J’ai cessé de courir derrière des chimères.
Propos recueillis par Agathe, Réseau Mondial de Prière du Pape en France