Joséphine ou la dignité retrouvée d’une esclave sexuelle
Équipe France
Le désir de servir le frère à la rue et les circonstances d’une rencontre ont conduit Pierre à aller au-delà de son engagement premier. Il a mis ainsi en actes, presque malgré lui, l’intention de prière de ce mois… Aujourd’hui cela le conduit à louer le Seigneur. Que son témoignage ouvre notre cœur et nos mains.
« Un soir, en fin d’une maraude du Secours Catholique déjà bien active, la Veille sociale (le 115) demande à mon équipe d’apporter de la nourriture à une femme pour laquelle des passants ont fait un signalement. Par acquis de conscience, mais en râlant compte tenue de l’heure tardive, nous nous résignons à nous rendre au-devant de cette personne.
En fait, nous découvrons avec effroi une jeune fille africaine de 18 ans, terrorisée, affamée, courtement vêtue. Joséphine vient de fuir un réseau de prostitution auquel sa famille l’a vendue quelques mois auparavant. Face à ce dénuement extrême et à des traces de violences, nous prenons la décision de l’accompagner aux urgences. A 5 heures du matin, apprenant qu’elle allait enfin être hospitalisée, je rentre chez moi fatigué, mais rassuré.
Contre toute attente, à 9H00 le dimanche matin, l’hôpital me rappelle pour me signifier que faute de chambre, Joséphine est « remise à la rue”.
Avec mon épouse, nous prenons sans trop réfléchir la décision de l’accueillir chez nous, le temps de lui trouver un foyer pour jeunes filles battues, ce dont elle bénéficie deux jours plus tard grâce au réseau du Secours Catholique.
Puis avec le temps, nous tentons de l’apprivoiser, de la consoler notamment pour l’enfant abandonné au pays, de l’aider dans ses démarches pour l’obtention de ses papiers. Et un jour elle nous apprend qu’elle est enceinte et qu’elle ne veut pas garder son enfant …
C’est à ce moment là que je me suis dit que j’aurais mieux fait de rester chez moi un certain soir de maraude, sagement assis devant la télé, plutôt que de m’engager dans cette aventure qui m’entraine vers des frontières inconnues.
A l’issue d’une confession auprès d’un jeune prêtre, Joséphine qui est chrétienne, décide à notre grand soulagement de garder son enfant et souhaite que j’en devienne le parrain. Fort de mon expérience dans le réseau WELCOME qui accueille des demandeurs d’asile, nous acceptons mon épouse et moi cette demande sans trop savoir où nous nous engageons toujours plus !
A l’heure actuelle, le bébé de Joséphine est en bonne santé, elle est toujours accompagnée par son foyer d’accueil, par Cap Emploi et nous lui avons trouvé un stage qui lui donne envie de s’intégrer au plus vite dans le monde du travail. Elle croque la vie.
Sans la confiance de mon épouse, du réseau du Secours Catholique et la paix donnée dans la prière, je ne me serais jamais senti capable d’accompagner Joséphine.
A la relecture, je loue le Seigneur pour cette rencontre fortuite. C’est Joséphine qui m’invite à dépasser mes frontières et à découvrir à travers sa souffrance et sa confiance donnée, l’incarnation de l’Amour du Christ sur terre. Je reconnais que c’est le Christ qui m’a permis cette rencontre, de participer à ma petite mesure à l’édification du Royaume. Sans Lui je ne suis rien, mais Lui peut me transcender et je m’en étonne encore ! La Fraternité est mon chemin de croissance ! »
Propos recueillis par l’Equipe France