Partir de la parole et des désirs des plus pauvres,
le seul chemin d’Église qui vaille la peine
Sébastien Combre, et le Réseau Mondial de Prière du Pape France 
Sébastien Combre en est convaincu et il vient d’en faire à nouveau l’expérience en tant que coordinateur du rassemblement de la Diaconie pour toute la province de Toulouse en ce mois de mai : partir de la parole, des idées et des désirs des plus pauvres est le seul chemin qui vaille la peine.
Lorsque tu vas au cirque, nous dit Sébastien, l’exercice de trapèze et de voltige te parait tellement simple que tu en occultes les heures de préparation et d’entrainement qui permettent ce résultat… C’est un peu pareil quand tu veux ‘faire à partir’ des plus pauvres et des plus exclus ; marcher à leur rythme ça prend du temps, mais cela a permis que ce rassemblement soit une réussite pour tous.
Comment est né ce projet provincial de rassemblement du Printemps de la Diaconie à Toulouse ?
Depuis Diaconia 2013 à Lourdes, beaucoup de choses sont nées dans les diocèses et les provinces, notamment le Service de la Diaconie qui cherche à mettre le service du frère au cœur de la pastorale et qui organise chaque année une ‘assemblée de la diaconie’ à partir d’un groupe appelé ‘Place et parole des pauvres’. C’est à partir d’une représentation provinciale de ce groupe qu’est né le désir d’un grand rassemblement. Celui-ci a pu se mettre peu à peu en place avec l’accord et l’implication des évêques.
Depuis 2013, la Diaconie a pris un nouveau visage, révélant que, pour se convertir à son importance, il faut d’abord en avoir fait l’expérience. Nous avons donc voulu proposer cette chance à une plus grande échelle. Les pauvres eux-mêmes ont contribué à cet appel dans leurs différents diocèses.
Concrètement, comment faire pour partir de la parole des plus pauvres ?
Pour ce rassemblement, on m’avait dit : tu ne t’en sortiras pas si tu ne fais pas un rétroplanning ; il faut que tout soit bien balisé et organisé à l’avance. Mais avec le plus fragiles, je sais que ce n’est pas cela qui marche ; j’ai donc fait le pari osé de les laisser exprimer leurs désirs et de les accompagner. J’accepte de ne pas savoir mieux qu’eux, je sais qu’ils ont des désirs à exprimer et je permets qu’ils jaillissent. Deux exemples concrets : une omelette géante, et une petite gazette, distribuée dans les rues de Toulouse et aux participants invités à l’omelette.
Les personnes ont exprimé le désir d’être missionnaires mais aussi de pouvoir s’adresser à ceux qui ne les écoutent pas, ne les regardent pas, les plus riches, avec lesquels ils n’ont pas de lien.
Nous avons d’abord pensé qu’il fallait à un moment du week-end permettre à un grand nombre de personnes de nous rejoindre. Nous nous sommes dit : quand on invite des gens à manger, beaucoup viennent, mais il faut que ce soit un peu fun… Nous avons eu l’idée de l’omelette géante et le séminaire de Toulouse nous a ouvert ses portes pour accueillir un large public. Si vous regardez la vidéo1, vous verrez de belles images de ce moment très réussi.
En cheminant dans le groupe ‘Parole des pauvres’, ils ont aussi dit qu’ils avaient envie de communiquer ce qui les fait vivre, qu’ils voulaient partager leur foi et leurs idées. Nous avons recueilli des phrases, des perles ; nous avons pensé les écrire sur un petit flyer et les distribuer aux invités de l’omelette géante, puis nous nous sommes dit que les distribuer dans la ville c’était encore mieux ; ainsi a germé l’idée d’une gazette…
Voilà comment naissent les projets : ce sont eux qui ont la parole. Pour la laisser naitre, nous avons eu huit journées de rencontres. Il faut y aller les mains vides, libérer leur parole et leur faire confiance et les résultats sont surprenants et tellement plus ajustés.
Quel bilan faites-vous de ce Printemps de la Diaconie et quels sont vos espoirs ?
Pour le père Joseph Wresinski, fondateur d’ATD Quart Monde, « tout nait d’une vie partagée et non d’une théorie ». Faire à partir d’eux et avec eux, ça marche, mais il faut pour cela mouiller la chemise ; il faut y croire fermement. J’espère que ce rassemblement va continuer à faire bouger nos diocèses ; je sais qu’il faut des moyens et une volonté. Quelque chose a été semé et j’espère qu’il y aura de belles pousses. On peut espérer que se mette en place une coordination provinciale de la diaconie et que chaque diocèse de notre région puisse se doter d’une assemblée annuelle.
Je suis persuadé que tout cela ne peut fonctionner sans une conversion des cœurs ; la conversion des structures, notamment ecclésiales, et celles des cœurs s’irriguent mutuellement.
Les pauvres sont les premiers à vivre l’Évangile et ils nous montrent le chemin : « Ce que tu as caché aux humbles et aux savants, tu l’as révélé aux plus petits ». Le pape François, au rassemblement à Rome en 2016, a montré qu’ils sont les plus à même de prier pour la conversion de l’Église ; il leur a demandé expressément de prier pour les riches. Ils sont les garants de la catholicité de l’Église, sans les pauvres, les exclus, l’Église n’est alors plus ‘catholique’ qui veut dire universelle et donc pour tous.
L’Évangile est bien un retournement, qui inverse nos manières de regarder le monde si nous acceptons de nous laisser transformer.
Propos recueillis par Claire Jeanpierre auprès de Sébastien Combre,
responsable de la Diaconie pour le diocèse de Toulouse.
Vidéo du Printemps de la Diaconie : www.youtube.com/watch?v=DzZG-r0Ko7A