Si nous manquons à la mission qu’il nous confie personnellement, nous freinerons l’avancée de son Amour
Pierre Cussonnet, et le Réseau Mondial de Prière du Pape en France
Pierre est parti une année à Madagascar, avec l’ONG Fidesco, dans un foyer pour personnes handicapées. Séminariste du diocèse de Toulouse, il témoigne pour nous de la façon dont ce temps vécu auprès des plus pauvres a révélé en lui un sens nouveau de la mission.
Lorsque je suis parti pour un an de mission à Madagascar, j’avais envie de quitter mes repères familiers, afin de me laisser former par le Seigneur, sans pouvoir compter sur mes forces humaines. Maintenant, avec le recul, je crois que je n’avais pas idée de ce que j’espérais en pensant cela. C’est une expérience particulièrement marquante de se retrouver réellement impuissant, incapable, loin de toutes les sécurités que notre société garantit. Alors je me rappelle un jour, au bout de quelques mois de mission où je n’ai plus eu d’autre choix que de courir à la chapelle, devant le Saint Sacrement, et de dire à Dieu que je ne pouvais plus, que je ne savais plus. Ce n’était pas du découragement, c’était l’apprentissage lent et libérateur de l’abandon dans le Seigneur.
Apprendre à aimer chaque personne en Jésus, et apprendre à aimer Jésus en chaque personne.
En effet, progressivement, au contact des personnes rencontrées, je me suis retrouvé complètement dépouillé, ne pouvant plus offrir que mon écoute, mon sourire, et l’amour du Seigneur. Dans ces situations où j’étais complètement dépassé, je ne pouvais plus tout calculer ou tout maîtriser, je ne pouvais que laisser jaillir la charité, qui n’est plus simplement amour humain, mais bien don de soi, au nom de Jésus. Apprendre à aimer chaque personne en Jésus, et apprendre à aimer Jésus en chaque personne. C’est une des grandes leçons que j’ai reçues, si loin de chez moi.
J’ai contemplé ce qu’était la charité qui ne calcule pas, qui est toujours ouverte.
Il me fallait partir, sortir de moi-même, pour laisser aux plus petits que je servais l’occasion de m’enseigner. Je n’oublierai jamais une mère arrivant en pleine nuit avec deux enfants à bout de force d’avoir marché toute la journée pour trouver un refuge, et qui s’effondrent de fatigue devant moi. Les deux enfants ont marché en plein soleil, sur des dizaines de kilomètres, sans manger. Nous les accueillons pour la nuit. Une dame leur offre un paquet de gâteaux, pour les requinquer, et je les porte tous les deux dans mes bras jusqu’à leur foyer pour la nuit. Là, nous tombons sur d’autres enfants qui vivent par ici. Alors, nos deux jeunes, épuisés, entament leurs gâteaux, et sans hésiter les partagent avec les autres. Ce soir-là, j’ai contemplé dans ces jeunes enfants ce qu’est la charité qui ne calcule pas, qui est toujours ouverte.
La mission repose avant tout sur toutes les grâces que le Seigneur veut accorder au monde.
C’est cette disponibilité que je retiens aussi : une rencontre n’est jamais un dérangement, mais toujours une opportunité. De fait, en partant en mission, je me suis rendu disponible pour un service. Je me rends compte, en y repensant, que si ma disponibilité m’a permis d’aider, de soulager, de servir les autres, elle a aussi creusé une ouverture en moi, me rendant capable de recevoir, et de recevoir au-delà de tout ce que j’aurais pu imaginer. Et c’est un point fort que je retiens de la mission : lorsque l’on part en mission, au loin, ou dans notre rue, on se préoccupe surtout de ce que l’on va pouvoir donner ou partager. Mais tout cela dépend trop de nous. Je crois profondément que la mission repose avant tout sur tout ce qui ne dépend pas de nous, à savoir toutes les grâces que le Seigneur veut accorder au monde, et qui jaillissent uniquement de sa Miséricorde, et tout ce que nous allons recevoir des autres, et qui dépend donc d’eux.
Un petit intermédiaire, qui n’a pas grand-chose à faire, mais sur qui tout repose.
Finalement, entre le Seigneur et ceux qu’il veut rejoindre à travers nous, chaque acteur de la mission n’est qu’un petit intermédiaire, qui n’a pas grand-chose à faire, mais sur qui tout repose : le Seigneur a besoin de moi, de chacun de nous, et si nous manquons à cette mission qu’il nous confie personnellement, nous freinerons l’avancée de son Amour. Alors n’ayons pas peur de nous mettre au service de cet Amour qui veut régner dans tous les cœurs !
Pierre Cussonnet, et le Réseau Mondial de Prière du Pape en France