Soutenir les personnels de santé, tout un défi !
Françoise Mellac, et le Réseau Mondial de Prière du Pape en France
Françoise a été longuement directrice d’établissement pour personnes âgées dépendantes. Elle nous livre ici son regard et sa réflexion sur les besoins des personnels de santé.
Mon expérience de directrice d’EHPAD de 1999 à 2016 m’a permis de mesurer l’énorme transformation du monde des maisons de retraite, et l’investissement important de l’État, des régions, des départements et des communes comme des associations ou des organismes gestionnaires pour humaniser ces lieux de fin de vie.
Il y a eu la rénovation des bâtiments, parfois à marche forcée et avec des regroupements imposés ; mais ils en avaient besoin pour s’adapter aux pathologies nouvelles et de plus en plus lourdes et à la dépendance croissante !
Il y a eu l’augmentation du nombre de salariés au service des résidents tant pour les soins (infirmiers, aides-soignants, médecins coordonnateurs, psychologues et tous les vacataires), que pour la vie quotidienne (animateurs, agents d’entretien, responsables qualité…).
Il y a eu des enveloppes budgétaires en constante augmentation, mais malheureusement toujours insuffisantes pour faire face à une dépendance elle aussi toujours croissante !
Car on soigne mieux, on fait de plus en plus de prévention, de rééducation, pour faire gagner la vie sur le handicap et sur la mort ! C’est un énorme progrès en soi.
Retrouver le temps du soin et de la rencontre
Le personnel est de mieux en mieux formé pour prendre en compte les besoins de chaque personne et maintenir une qualité de vie jusqu’au bout, pour être près de la personne et la regarder au-delà de sa maladie. Mais les soignants souffrent depuis longtemps de ne pouvoir mettre en pratique ce qui donne sens à leur choix professionnel. Combien en ai-je vu pleurer de ne pas avoir les quelques minutes nécessaires pour réconforter, apaiser, encourager, répondre paisiblement à une sonnette !
Que de leçons d’humanité m’ont-ils données en mettant au centre de leurs préoccupations, au centre des choix d’organisation des services, les personnes les plus faibles, seules, vulnérables, celles que l’on n’entend pas ou qui se résignent !
Les médias, à grand renfort des unes des journaux, pointent avec raison tous les dysfonctionnements dans ces lieux de fin de vie, en mettant l’accent sur le manque de personnel, leur usure, les économies à courte échelle, et tout cela est vrai ! Mais pourquoi en arrive-t-on à ce point ? Alors que les prix de journée ne cessent d’augmenter ?
Revenir à la présence humaine, notre présence à chacun
Pourquoi demande-t-on des contrôles de l’administration ? Ne serait-on plus capables de voir par nous-même en tant qu’enfant, fratrie, neveu, voisin, bénévole ? Oui, il faut de la présence humaine : présence en nombre suffisant de professionnels qui apportent en plus du soin leur propre humanité. Mais ils ne pourront pas tout et en réclamant toujours plus pour eux, n’y a-t-il pas danger de nous décharger de notre propre responsabilité pour que les malades, les personnes en fin de vie soient encore dans la vie ?
Que la fragilité soit au cœur des projets de société
Sans doute nous faut-il élargir notre regard. Notre société occulte souvent la maladie, la fragilité, la fin de vie, ou s’en sert dans une logique commerciale ! Comment ne pas détourner notre regard de toute personne fragile, en souffrance, et la mettre au centre de nos préoccupations ? Plus encore que de l’ordre des moyens indispensables, les enjeux pour les gouvernements et les communautés locales sont de l’ordre des questions éthiques et philosophiques, spirituelles, pour que la faiblesse soit au cœur des projets de société. Une société qui ne prend plus en compte les plus fragiles et la mort elle-même perd le sens de la fraternité. Les pays en voie de développement nous donnent une belle leçon de solidarité familiale et locale. Mais eux ont vraiment besoin d’un accès aux soins physiques.
Prions donc pour que les gouvernements et les communautés locales apportent à travers nos exigences et nos engagements un véritable soutien aux soignants qui agissent auprès des malades et des personnes en maison de retraite.
Françoise Mellac, et le Réseau Mondial de Prière du Pape en France