Trois pas dans la bible
pour compatir et agir
Daniel Régent sj., Réseau Mondial de Prière du Pape en France Prions pour que la communauté internationale s’engage concrètement dans l’abolition de la torture et assure un soutien aux victimes ainsi qu’à leurs familles.
Au début de son évangile, saint Jean écrit : « [le Verbe] est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu » (Jn 1,11). Jésus a été rejeté par son peuple. Au sens institutionnel, on ne peut parler de torture. Sa mort, aussi barbare soit-elle, est l’exécution d’une sentence judiciaire réclamée par les autorités juives et accordée par Pilate pour préserver le calme social. Mais au plan humain, le mot torture est adapté. Pendant toute sa vie publique, les Juifs n’ont cessé de chercher à mettre Jésus en contradiction avec leur pratique de la Loi. Ils n’ont pas voulu voir les signes qu’il faisait, signes de l’œuvre du Père, dans la ligne de la libération d’Égypte et des annonces de prophètes.
Pour rejoindre les torturés dans une prière de compassion, nous contemplons trois étapes de la Passion de Jésus.
Premier pas : la flagellation et le couronnement d’épines

« Pilate, voulant contenter la foule, relâcha Barabbas et, après avoir fait flageller Jésus, il le livra pour qu’il soit crucifié. Les soldats l’emmenèrent à l’intérieur du palais. Alors ils rassemblent toute la garde, ils le revêtent de pourpre, et lui posent sur la tête une couronne d’épines qu’ils ont tressée. Puis ils se mirent à lui faire des salutations, en disant : « Salut, roi des Juifs ! » Ils lui frappaient la tête avec un roseau, crachaient sur lui, et s’agenouillaient pour lui rendre hommage. Quand ils se furent bien moqués de lui, ils lui enlevèrent le manteau de pourpre, et lui remirent ses vêtements » (Mc 15,15-20).
L’évangéliste ne met pas l’accent sur les souffrances physiques endurées par Jésus, mais sur la dérision et les moqueries. Elles visent à détruire la dignité. Ce faisant, ce sont les auteurs de cette condamnation qui perdent la leur. Or la mission de Jésus est de les sauver de ce naufrage !
J’entre dans la douleur de Jésus. Je demande miséricorde pour moi et pour toutes les moqueries proférées dans le monde qui blessent et tuent.
Deuxième pas : Simon de Cyrène et les femmes

« Comme ils l’emmenaient, ils prirent un certain Simon de Cyrène, qui revenait des champs, et ils le chargèrent de la croix pour qu’il la porte derrière Jésus. Le peuple, en grande foule, le suivait, ainsi que des femmes qui se frappaient la poitrine et se lamentaient sur Jésus. Il se retourna et leur dit : « Filles de Jérusalem, ne pleurez pas sur moi ! Pleurez plutôt sur vous-mêmes et sur vos enfants ! » » (Lc 23,26-28).
Jésus n’a pas la force de porter seul la croix. Il ne s’arrête pas à sa douleur, mais souffre pour le monde et oriente les femmes dans ce sens. La tradition juive dit que des femmes préparaient pour les condamnés des breuvages apaisants. Au cœur de la barbarie, des gestes humains de compassion sont accomplis. Les hommes ne sont pas entièrement mauvais. Jésus poursuit son œuvre de bienveillance pour que se restaure en eux le meilleur.
Avec Jésus, je souffre pour le monde. La torture défigure l’humanité. Je rends grâce pour celles et ceux qui écoutent au fond d’eux-mêmes l’appel à se lever au nom de la dignité humaine imprescriptible.
Troisième pas : le cœur transpercé

« Quand il eut pris le vinaigre, Jésus dit : « Tout est accompli. » Puis, inclinant la tête, il remit l’esprit. Comme c’était le jour de la Préparation (c’est-à-dire le vendredi), il ne fallait pas laisser les corps en croix durant le sabbat, d’autant plus que ce sabbat était le grand jour de la Pâque. Aussi les Juifs demandèrent à Pilate qu’on enlève les corps après leur avoir brisé les jambes. Les soldats allèrent donc briser les jambes du premier, puis de l’autre homme crucifié avec Jésus. Quand ils arrivèrent à Jésus, voyant qu’il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais un des soldats avec sa lance lui perça le côté ; et aussitôt, il en sortit du sang et de l’eau » (Jn 19,30-34).
Jésus le dit : « tout est accompli », puis il remet l’esprit. La mort n’a pas gagné, mais la vie. L’eau et le sang qui sortent de son côté ouvert l’attestent. La vie nouvelle est donnée à ceux qui s’approchent. Si le monde est capable du pire, l’amour divin retourne les cœurs et les délivre de la mort. La violence reste à l’œuvre dans le monde, mais en Jésus « tout est accompli » ; ses disciples vivent de cette réalité.
Au cœur du mystère du mal, devant la croix de Jésus, en pensant à ceux que l’on torture, je contemple comment Dieu agit avec la force de l’amour, et désarme la violence. Je lui demande la force de marcher à sa suite.
Daniel Régent sj., Directeur du Réseau Mondial de Prière du Pape France